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VIVRE LA VIE CHRÉTIENNE AU SEIN D’UNE CULTURE ÉTRANGÈRE

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Étrangers dans un pays étranger, nous sommes appelés, en tant que chrétiens, à vivre une vie honorable et moralement droite, afin que nos semblables glorifient Dieu, et que nous accomplissions ainsi notre mission envers ceux qui nous entourent.

Quand j’avais 12 ans, mes parents ont décidé d’immigrer. Nous avons quitté l’environnement sûr du pays de ma naissance pour nous établir à l’autre bout du monde. À bien des niveaux, ça a été pour moi un énorme changement ! Par une chaude journée d’été, après avoir nagé une dernière fois dans la mer, nous sommes montés à bord d’un avion et avons atterri dans un monde figé dans le froid. Nous avons troqué l’été contre l’hiver. Dès le lendemain, je suis allé à une nouvelle école. Le port de l’uniforme n’étant pas obligatoire, je me sentais délicieusement libre. Par contre, qu’il était déroutant de ne pas connaître la langue de mes camarades de classe et de mes professeurs…

Le plus grand changement, toutefois, était de nature religieuse. Alors que nous étions en Afrique du Sud, je fréquentais une école adventiste la semaine et allais à l’église adventiste le sabbat. Presque toutes mes connaissances étaient adventistes. Mais aux Pays-Bas, je me suis subitement retrouvé à être le seul adventiste du coin. Dans notre ville, nous étions, en effet, l’unique famille adventiste. Soudain, la vie religieuse est devenue très différente. Soudain, mon identité adventiste, laquelle m’avait jusqu’à présent rempli d’un sentiment de sécurité, faisait de moi un étranger.

Comment vivre notre foi dans un pays étranger ?

LES PREMIERS CHRÉTIENS

Récemment, j’ai présenté un séminaire postuniversitaire sur les courtes épîtres – communément appelées catholiques – consignées à la fin du Nouveau Testament. Au sein de l’Église adventiste, on oublie souvent ces petits livres parce qu’on tend à se focaliser sur les épîtres « importantes », telles que celles de Paul. Les livres ayant pour thème ces épîtres plus courtes se font rares – chose étrange quand on considère que l’un des fondements de la Réforme était Tota Scriptura (L’Écriture tout entière).

Et c’est malheureux, car ces lettres nous donnent des aperçus de la vie chrétienne distincts de ceux consignés dans les autres épîtres du Nouveau Testament. Elles se focalisent sur la façon d’exercer une vie morale fondée sur nos convictions théologiques. Quel est donc le lien entre la réalité de notre vie et la victoire sur les puissances des ténèbres – victoire déjà assurée ? La première épître de Pierre tente de répondre à cette question. En quoi notre vie, avec tous ses malheurs, est-elle liée au retour imminent de Jésus, lequel tarde trop au goût des croyants ? Jacques, lui, présente la façon dont le « commandement nouveau » de Jésus disant de nous aimer les uns les autres devrait influencer notre vie quotidienne. Et que dire de 1 Jean, où l’amour va de pair avec notre confession de Christ ? La grâce de Dieu signifie-t-elle que nous pouvons faire tout ce qui nous chante parce que de toute façon, croyons-nous, nous serons pardonnés ? Bien au contraire ! s’écrie Jude.

Ainsi, nous avons là des petits livres, souvent oubliés, qui se focalisent sur la réalité de l’exercice d’une vie chrétienne. Tandis que ces aspects nous sont utiles, l’un d’entre eux touche une corde sensible particulière à la lumière de mes propres expériences : les premiers propos de Pierre au sujet des inconnus et des étrangers. Ces lettres m’interpellent vraiment, moi qui fus un étranger pendant la plus grande partie de mon adolescence.

INCONNUS ET ÉTRANGERS

La première épître de Pierre s’adresse aux élus de Dieu : les « étrangers » (1 P 1.1)*. C’est un mot (et un thème) que l’on retrouve régulièrement dans cette lettre. Traditionnellement, le concept d’« exilés » était compris de façon métaphorique. Nous sommes des exilés ici-bas. Mais plus récemment, des théologiens ont remarqué que Pierre s’exprimait d’abord et avant tout de façon littérale. Les premiers chrétiens étaient des exilés. Leur nouvelle religion avait fait d’eux des inconnus dans leur propre pays, des étrangers parmi des amis. En fait, lire « exilés » de façon métaphorique banalise l’expérience religieuse des premiers chrétiens à une oppression strictement sociale et politique.

Pour nous, croyants des temps modernes, de nombreuses similarités peuvent être tirées des contextes sociopolitiques des premiers chrétiens. Tandis qu’il existe une grande fluctuation entre les pays du monde entier, les chrétiens – et certainement les adventistes – sont généralement une minorité. Même les pays historiquement chrétiens deviennent de plus en plus sécularisés. En tant que chrétiens, nous sommes souvent, comme je l’étais pendant mon adolescence, des étrangers.

UN CONSEIL AUX ÉTRANGERS

Le conseil de Pierre aux exilés est très intéressant. Tandis que la plus grande partie des lettres de l’apôtre tourne autour de ce thème, ce dernier constitue l’essentiel de son message dans le deuxième chapitre de sa seconde épître. Il écrit : « Bien-aimés, je vous exhorte, comme étrangers et voyageurs sur la terre, à vous abstenir des convoitises charnelles qui font la guerre à l’âme. Ayez au milieu des païens une bonne conduite, afin que, là même où ils vous calomnient comme si vous étiez des malfaiteurs, ils remarquent vos bonnes œuvres, et glorifient Dieu, au jour où il les visitera. » (1 P 2.11, 12)

Pierre va droit au but : en tant qu’étrangers et exilés, nous, chrétiens, devrions mener une vie honorable. Non parce que Dieu nous jugera, non à cause des 10 com- mandements, non parce que Jésus nous a dit d’aimer notre prochain. Toutes ces choses sont importantes, mais pour Pierre, il y a quelque chose de beaucoup plus important dans sa présentation de la vie chrétienne. Nous devons mener une vie honorable, dit-il, simplement pour que nos semblables glorifient Dieu. Nous devons mener une bonne vie parce que nous avons une mission à accomplir envers ceux qui nous entourent.

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Plus loin, il reprend ce thème dans un passage très difficile, il faut le dire, des Écritures : « Serviteurs, soyez soumis en toute crainte à vos maîtres, non seulement à ceux qui sont bons et doux, mais aussi à ceux qui sont d’un caractère difficile. Car c’est une grâce que de supporter des afflictions par motif de conscience envers Dieu, quand on souffre injustement. » (1 P 2.18-20) À priori, ce passage peut horrifier le lecteur moderne. L’esclavage est un terrible mal ! N’est-il pas affreux de trouver dans la Bible une exhortation appelant les esclaves à souffrir honorablement ? Les athées se servent souvent de ce pas- sage pour prouver que le christianisme ne peut être bon.

Cependant, un tel passage – lu et analysé dans son contexte – présente une explication différente. Pierre s’inquiète des opprimés au sein de la société : exilés, étrangers, esclaves, femmes. Il s’adresse à ceux qui souffrent injustement, terriblement, comme c’est le cas des esclaves, et à ceux qui souffrent peut-être moins horriblement. L’apôtre ne peut changer leur sort, ni mettre un terme à leur souffrance. Mais il peut les encourager à fixer les yeux sur ce qui est important. Ces exemples nous servent de modèles à nous aussi – même si, en général, nous sommes en meilleure posture qu’eux. Si les esclaves peuvent vivre honorablement en dépit de leur grande souffrance, nous pouvons sûrement vivre honorablement avec nos difficultés décidément moindres.

Ce n’est pas à dire que nous devons nous abstenir de nous élever contre l’injustice. Tout chrétien doit se dresser contre elle. Les prophètes de l’Ancien Testament sont on ne peut plus clair à ce propos. Mais, tandis que la société s’évertue à trouver des solutions à l’inégalité, la vie doit continuer. Les esclaves à qui Pierre écrivait étaient probablement nés esclaves et mourraient esclaves. Ils ne pouvaient pas faire grand-chose à ce sujet, mais ils pouvaient vivre honorablement. Ils pouvaient montrer que les chrétiens sont différents. Ils pouvaient être des témoins.

Toute personne, par sa vie, peut être un témoin – pas nécessairement par ce qu’elle dit, mais par ce qu’elle fait. Les esclaves peuvent souffrir avec patience, afin que les autres voient leurs actes et glorifient Dieu (1 P 2.19). Les femmes peuvent accepter l’autorité de leur mari afin que les autres, touchés par leur comportement, glorifient Dieu (1 P 3.1). Tous peuvent vivre honorablement afin que leurs semblables voient leurs actes et glorifient Dieu (1 P 2.12). Nous, étrangers, pouvons vivre chrétiennement, témoignant ainsi pour tous ceux qui nous entourent.

UNE SOUFFRANCE QUI TRANSFORME LE MONDE

Ce que j’ai dit dans mon séminaire, c’est que 1 Pierre est un livre qui traite de la façon dont la réalité de notre vie est reliée au triomphe du Christ sur le mal. Dans cette réalité, les autres et nous-mêmes souffrons injustement en tant qu’inconnus, étrangers, exilés, esclaves, pauvres. Pierre nous révèle la puissance d’une bonne vie en dépit de la souffrance : c’est précisément les étrangers qui peuvent témoigner par le biais d’une vie honorable. Mais avant de croire Pierre sur parole, sachons qu’il n’en a pas encore fini avec son argument. Il poursuit avec l’exemple ultime : « Et c’est à cela que vous avez été appelés, parce que Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez ses traces, lui qui n’a point commis de péché, et dans la bouche duquel il ne s’est point trouvé de fraude ; lui qui, injurié, ne rendait point d’injures, maltraité, ne faisait point de menaces, mais s’en remettait à celui qui juge justement » (1 P 2.21-23).

Vivre honorablement, en dépit de la souffrance, n’est pas un sort qui nous est uniquement réservé. Jésus a connu aussi ce sort dans sa vie et sa mort. La souffrance de notre Messie nous a garanti notre place avec Dieu dans la nouvelle création. De façon similaire, notre souffrance peut aider les autres dans cette création actuelle et dans celle à venir. Rester fidèles, vivre honorablement, donner l’exemple est la meilleure façon pour nous de témoigner auprès de ceux qui nous entourent. Voilà ce qu’est la vie chrétienne.

* Sauf mention contraire, toutes les citations des Écritures sont tirées de la version Louis Segond 1910.

Tom de Bruin (titulaire d’un doctorat de l’Université de Leiden, aux Pays-Bas) est chargé de cours en Nouveau Testament à l’université adventiste Newbold, à Binfield, dans le Berkshire, en Angleterre.

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