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John a dépassé la gare et les tas de charbon, et il les a “sauvés” !

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Ces dons qui ne font pas de bruit…

« Qu’ils sont beaux sur les montagnes, les pieds de celui qui apporte de bonnes nouvelles, qui publie la paix ! De celui qui apporte de bonnes nouvelles, qui publie le salut ! De celui qui dit à Sion : ton Dieu règne ! » (Es 52.7)

L’évangélisation ne peut être, et ne doit pas être, que publique !

Ils habitent dans une petite maison, une très petite maison au toit en tôle ondulée – plutôt mal construite – bref, dans une maison australienne standard du milieu du 20e siècle. Cette maison se trouve au bout de la route menant à la gare, juste après les énormes tas de charbon qui alimentent les trains. La route semble se terminer à la gare ; mais en réalité, un sentier poussiéreux se prolonge au-delà de la gare. On peut facilement le rater. Et où mène-t-il ? À la petite maison plutôt mal construite.

Agnes, Ted, son mari, et les plus jeunes de leurs huit enfants vivent dans cette maison1. Ted est un employé du chemin de fer. Il est absent la plupart du temps. Son travail consiste à alimenter la chaudière avec du charbon. C’est pour ça que cette famille vit là, juste après les tas de charbon, au bout de la route menant à la gare.

Pam, l’une des filles d’Agnes, habite dans un autre secteur de la petite ville de Muswellbrook. Elle est mariée et mère d’un petit garçon. Malgré tout, dans la maison après la gare, au bout de la route, Agnes sou re de solitude. Pam est à peu près la seule personne qui lui rend visite. Personne ne vient chez nous, se dit Agnes, même pas les voyageurs de commerce… Voilà qui est inhabituel dans l’Australie du début des années 1950, époque où de nombreux vendeurs vont de maison en maison pour vendre leur marchandise !

Agnes fait partie de l’Église presbytérienne. Les femmes de son église locale ont formé un groupe et se réunissent régulièrement. Un dimanche, elles sont tout en émoi : deux groupes de soi-disant chrétiens radicaux, hérétiques, sont arrivés à Muswellbrook ! Il y a les témoins de Jéhovah — et pire encore, les adventistes du septième jour ! Les femmes imaginent toutes sortes de scénarios quant à la façon dont ces gens pourraient frapper chez elles. Agnes, elle, se dit : au fond, c’est peut-être une bénédiction de vivre après la gare, au bout de la route !

LES ADVENTISTES SONT EN VILLE !

Pas un témoin de Jéhovah ne se présente chez Agnes. Mais un jour, alors que Pam et son fils lui rendent visite, quelqu’un frappe à la porte. Quoi ? Personne n’a jamais frappé à la porte de cette maison — pas même le pasteur d’Agnes et de Pam ! Agnes se dit : est-ce une erreur ? Mais ensuite, les deux femmes se disent : si ce n’est pas une erreur, alors c’est une mauvaise nouvelle. Il est arrivé quelque chose à Ted, c’est certain ! Il n’y a que les employés de la gare qui viendraient chez nous. Eux seuls savent que nous sommes ici.

Très inquiète, Agnes ouvre la porte. À sa grande surprise, elle aperçoit un jeune homme de petite taille, propre, et d’apparence soignée. Son complet bleu usagé ne lui va pas comme un gant ; cependant, il est bien repassé. Stupéfaite, Agnes lance tout de go : « Mais qui êtes-vous ? » « Je suis un pasteur adventiste, Madame. »

Agnes a envie de répondre : « Monsieur, je suis presbytérienne. Nous avons notre église en ville. Gardez donc vos étranges doctrines pour vous ! » Mais comment pourrait-elle repousser quelqu’un qui, en n, est venu chez elle et a frappé à sa porte ? C’est tellement extraordinaire qu’elle répond plutôt : « Entrez. »

Agnes offre à l’homme une tasse de thé — une coutume dans l’Australie d’alors. Il décline poliment
et demande plutôt un verre d’eau. Puis, il entame avec Agnes et Pam une agréable conversation pour mieux les connaître. Il s’enquiert de leur famille, de leur mari, des autres enfants adultes d’Agnes, des espérances et des craintes des deux femmes. Puis, il leur parle d’une espérance qui va au-delà des choses de ce monde, d’une espérance qui pourrait les aider à surmonter leurs craintes. Alors qu’il s’apprête à prendre congé, Pam songe sérieusement à étudier la Bible avec lui — ce qu’elle fait au cours des prochains mois.

Agnes, elle, hésite. Mais en découvrant ce que Pam a appris dans ces études bibliques, elle décide de se joindre à eux. Vous devinez sans doute la suite. Agnes, Ted, Pam ainsi que trois autres de ses frères et sœurs, et (finalement) les enfants de Pam se font tous baptiser au sein de l’Église adventiste.

UNE ÉVANGÉLISATION DISTINCTEMENT ADVENTISTE

Si je vous raconte cette histoire, c’est pour deux raisons. Premièrement, le pasteur en complet
bleu, c’était John Trim — mon père. Deuxièmement, elle donne à réfléchir sur la façon dont les gens se joignent à l’Église adventiste.

L’adventisme a ses célébrités : les évangélistes publics. Et ceci a été vrai dans la plus grande partie de notre histoire. De Merritt E. Cornell à Mark Finley, de H.M.S. Richards à C. D. Brooks, de John Loughborough à John Carter, les évangélistes sont des personnages presque légendaires — nos « stars rock », en quelque sorte. Grâce à leurs compétences remarquables, l’évangélisation publique a été une grande bénédiction pour le mouvement, et continue de l’être dans de nombreuses parties du monde.

Cependant, il nous arrive de supposer que notre Église est venue à l’existence grâce aux campagnes d’évangélisation d’envergure. Mais à vrai dire, ce n’est pas comme ça que nos premiers pionniers en ont posé les fondements. Chose certaine, vers les années 1860, John Loughborough et Merritt Cornell plantaient de grandes tentes et y tenaient des campagnes d’évangélisation. Dès lors, la « grande tente » est devenue notre signature.

Mais en examinant les débuts du mouvement adventiste jusqu’aux années 1850, nous découvrons que les fondements de ce mouvement ont été posés par des gens tels que Joseph Bates, James White, John Byington, et d’autres encore. Ces pionniers voyageaient par train, s’arrêtaient dans les petites villes, et étudiaient les Écritures avec des individus et des familles.

En entrant dans une nouvelle ville, nos premiers « évangélistes » se demandaient : « Y a-t-il quelqu’un ici qui croit au retour de Jésus ? (le code pour “qui a été un millérite ?”) ». Ils se demandaient également : « Y a-t-il quelqu’un ici qui étudie les Écritures avec zèle ? » Si tel était le cas, ils frappaient à leur porte. Si on les accueillait, ils étudiaient la Bible avec leurs hôtes. Ainsi, à l’origine, notre mouvement ne reposait pas sur des campagnes d’évangélisation d’envergure ; les pionniers allaient plutôt chez les gens et leur donnaient des études bibliques.

LES LIMITES DE L’ÉVANGÉLISATION PUBLIQUE

Il ne s’agit pas seulement d’un fait historique, mais aussi d’un point important pour l’Église aujourd’hui. Dans de grandes parties du monde, l’évangélisation publique est impossible en raison des lois restrictives. Au moins 2 milliards de personnes dans le monde n’auront jamais l’occasion d’assister à un séminaire sur la prophétie ou à une grande campagne d’évangélisation — à moins que leurs gouvernements changent miraculeusement leurs politiques ! En Europe, et de plus en plus en Amérique du Nord et dans certaines parties de l’Amérique latine, l’évangélisation publique n’est plus la méthode la plus efficace pour atteindre nos semblables.

Il faut le reconnaître : on a beau en faire efficacement la promotion, profiter d’un soutien financier et logistique généreux, disposer d’excellents graphiques, avoir un orateur éloquent, être doté d’organisateurs remplis de l’Esprit qui, dans un esprit de prière, les organisent, et les entreprennent : la plupart des gens n’assistent plus aux réunions publiques, à moins d’avoir une connaissance préalable avec le groupe hôte.

En Europe, il en est ainsi depuis de nombreuses années. Mais ce n’est pas tout : une recherche récente effectuée par des membres de la faculté de religion de l’Université adventiste Southern révèle que même aux États-Unis, l’évangélisation publique n’atteint aujourd’hui qu’une partie de la population — et cette partie rétrécit de plus en plus (2).

Cependant, en constatant que les efforts publics évoquent l’embarras ou l’indifférence, on court le danger de mettre l’évangélisation au rancart. Si l’évangélisation est seulement publique, alors, il n’est que trop facile de dire : « Bon, puisque l’évangélisation ne marche pas, nous allons simplement concentrer nos efforts sur l’intérieur. Que pouvons-nous faire d’autre ? »

L’ÉVANGÉLISATION : BIEN PLUS QU’UNE INITIATIVE PUBLIQUE

Heureusement, il existe une autre forme d’évangélisation : rencontrer des gens — frapper à leur porte, devenir leurs amis, étudier la Bible avec eux, etc. C’est exactement ce que mon père a fait. Était-ce un homme parfait ? Absolument pas. Et cependant, je n’ai jamais rencontré d’homme plus chrétien que lui. Par contre, il n’avait pas le don de l’évangélisation publique — du moins par rapport à son époque et à son appel.

Après avoir reçu son diplôme de formation pastorale de l’Institut d’enseignement supérieur d’Avondale, il a assisté George Burnside (un nom bien connu en Australie et en Nouvelle-Zélande, même aujourd’hui) dans une campagne d’évangélisation d’envergure. Ça a été son premier emploi. Dans les années 1940 et 1950, l’extraordinaire puissance de la prédication de George Burnside a édifié l’Église de façon remarquable dans ces pays.

À titre d’assistant de ce fameux évangéliste, mon père s’est vu confier la direction d’églises locales. Plus tard, il a tenu ses propres campagnes d’évangélisation, sans grand succès. Un jour, il m’a avoué que malgré ses efforts et sa bonne volonté, il n’arrivait toujours pas à apprécier ce type d’évangélisation.

Mon père était de nature timide. L’évangélisation publique n’était pas son fort. Ce qu’il aimait le plus, c’était étudier la Bible avec les gens et enseigner à ses membres d’église à donner des études bibliques. Il a découvert des façons de renverser les barrières pour que les gens désirent étudier la Bible avec lui, et aient envie plus tard d’assister aux campagnes d’évangélisation. Il a aussi découvert que la radio et les journaux étaient d’excellents outils pour présenter l’adventisme tel qu’il est vraiment : amical et christocentrique, et qu’il n’est ni à craindre ni à éviter.

Mon père avait également une passion pour l’évangélisation par la santé et la tempérance. Il a compris qu’en enseignant aux gens comment remporter la victoire sur le tabac et l’alcool, il gagnerait leur confiance. Dans les années 1970, il a aussi compris qu’en montrant aux gens comment contrôler leur pression artérielle, gérer leurs stress, faire de l’exercice, et cuisiner des repas santé, il leur ouvrirait la porte de l’adventisme. L’enseignement d’un mode de vie sain ici et maintenant pourrait ouvrir la voie à l’enseignement de la vie éternelle !

LA MÉTHODE DU CHRIST

Mon père utilisait la méthode du Christ — une méthode qui tire son nom d’une observation profonde d’Ellen White : « La méthode du Christ pour sauver les âmes est la seule qui réussisse. Il se mêlait aux hommes pour leur faire du bien, leur témoignant sa sympathie, les soulageant et gagnant leur confiance. Puis il leur disait : “Suivez-moi (3).” »

Cette méthode, mon père en a fait l’expérience de manière frappante dans trois pays. En plus d’être un pionnier de l’évangélisation par la santé communautaire en Nouvelle-Zélande et en Inde, il a contribué à son développement en Australie. Il a également utilisé les médias de façons novatrices pour promouvoir l’Église en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Voilà ce que mon père a fait. C’est ce que Jésus ferait s’il était ici. C’est exactement ce qu’il a fait lors de son ministère terrestre. Et c’est ce qu’il voudrait que nous fassions aujourd’hui.

Mais il ne suffit pas de bien communiquer, ou de rendre l’adventisme aussi amical que possible, ou d’aider les gens à faire des choix santé qui réduisent leur stress et préviennent leur admission dans nos merveilleux hôpitaux adventistes. Et ça, mon père l’a toujours su.

Il faut aussi appliquer la dernière partie de la fameuse citation du Ministère de la guérison mentionnée plus haut : après que Jésus se soit mêlé aux hommes, leur ait témoigné sa sympathie, les ait soulagés et ait gagné leur confiance, alors il leur disait « Suivez-moi ». Au moment approprié,nous devons nous aussi inviter nos semblables à suivre le Maître.

Mon père était conscient de l’« œuvre » qui consiste à inviter. Il voulait améliorer la vie de ses semblables et ainsi, leur rendre l’Église adventiste attrayante. Mais il désirait aussi les aider à suivre Jésus ; par conséquent, chaque fois que c’était possible, il cherchait à étudier les Écritures avec eux.

Dans un texte tout aussi familier pour les adventistes, Christ dit à Jean, et à nous : « Voici, je me tiens
à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui, je souperai avec lui, et lui avec moi. » (Ap 3.20) Christ est à la porte et frappe ; nous, ses disciples, devons faire de même.

L’IMPLICATION TOTALE DES MEMBRES

J’ai voulu vous raconter cette histoire pour une troisième et dernière raison. Beaucoup d’entre nous n’ont pas reçu le don spirituel des évangélistes. Il n’est pas donné à tous de prêcher à des milliers d’auditeurs à
la fois ! En fait, ce don spirituel est rare. Si l’évangélisation n’est que publique, si elle n’est dirigée que par
le clergé professionnel (souvent des évangélistes professionnels), jamais elle n’entraînera l’implication totale des membres.

Si, par contre, nous avons d’autres dons spirituels, n’en concluons pas que nous n’avons pas de part active à jouer dans le grand second mouvement adventiste — que l’on ne veut pas de nous ou que l’on n’a pas besoin de nous dans la propagation de l’Évangile.

Il y a trois ans, j’ai rendu visite à mon père dans une résidence pour personnes âgées. Il était atteint de la maladie de Parkinson, à un stade avancé. Ma mère m’a dit : « Il y a ici une femme que ton père et moi avons connue au début de notre ministère. » Nous avons installé mon père dans une chaise roulante, puis nous nous sommes rendus à un autre étage.

Là, ma mère a salué une dame âgée entourée de l’une de ses filles et de sa petite-fille. C’était Pam ! Et Pam m’a raconté l’histoire que vous avez lue au début de cet article. Ensuite, les larmes aux yeux, elle m’a cité ce texte : « Qu’ils sont beaux sur les montagnes, les pieds de celui qui apporte de bonnes nouvelles ». Et elle a ajouté : « David, nous louons Dieu chaque jour pour votre père, parce qu’il a dépassé la gare, les tas de charbon,
et qu’il a frappé à notre porte. Notre famille tout entière sera sauvée à cause de cela ! »

Dire que mon père avait été tenté de ne pas se rendre à la maison d’Agnes ! En cette fin d’après-midi d’un chaud été australien, il était bien fatigué. Mais il s’est ressaisi. « J’ai promis au Seigneur d’aller à chaque maison ». Il a tenu sa promesse. Il est allé frapper à la dernière maison au bout de la route.

Nos dons spirituels ne signifient pas que nous nous retrouverons à frapper aux portes. Ce qu’il faut retenir, c’est que chaque disciple de Jésus a un rôle à jouer dans le partage de la bonne nouvelle de notre Seigneur et sauveur. Il n’en tient qu’à nous de découvrir le nôtre, tout comme John Trim, à Muswellbrook, il y a 65 ans.

« Voici, je me tiens à la porte, et je frappe. »

David Trim est directeur du Bureau des Archives, des statistiques, et de la recherche de la Conférence générale.

1 Noms fictifs.
2 Alan Parker, « Does Evangelism Still Work? », Ministry, août 2017.
3 Ellen G. White, Le ministère de la guérison, p. 118.

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