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Un zèle vaudois dans le ministère sur les campus publics

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Dialogue s’entretient avec l’ancien coordinateur et le nouveau coordinateur du Ministère sur les campus publics (PCM) et des Étudiants vaudois pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Cette entrevue s’est déroulée à un moment où le bâton du leadership venait juste de passer de l’un à l’autre. Dale Sherman (pseudonyme) a commencé le programme et l’a dirigé pendant sept ans. En octobre 2019, Barnabas Hope (pseudonyme) a assumé le même rôle. Les deux hommes habitent et travaillent à Beyrouth, au Liban.

 

DIALOGUE : Nous croyons que Dieu accorde une valeur infinie aux jeunes. Ceci est particulièrement vrai des jeunes qui luttent avec les grandes questions de la vie sur les campus universitaires. Pouvez-vous citer un exemple historique qui peut nous aider à comprendre cette dynamique ?

Dale : En tant que dirigeant sortant du Ministère sur les campus publics et coordinateur des Étudiants vaudois pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, je découvre dans le témoignage des Vaudois un bon exemple de la façon dont Dieu s’occupe des jeunes et leur donne la capacité d’accomplir sa mission. La description des Vaudois dans le livre intemporel La tragédie des siècles m’inspire. Remarquez l’accent mis sur les étudiants universitaires, sur leur appel et sur leur objectif :

« Alors que les Vaudois considéraient la crainte de l’Éternel comme le commencement de la sagesse, ils ne méconnaissaient pas, dans le développement des facultés intellectuelles, l’importance de leurs relations avec le monde extérieur, de la connaissance des hommes et de la vie active. Quelques jeunes gens, envoyés de leurs écoles isolées dans des universités de France et d’Italie, trouvaient dans celles-ci un champ d’étude et de réflexion plus étendu qu’au sein de leurs Alpes. Ils y entraient en contact avec le vice et s’y trouvaient exposés à des tentations ; les agents de l’Adversaire leur tendaient des pièges et leur suggéraient de subtiles hérésies. Mais leur éducation antérieure les avait préparés à sortir victorieusement de l’épreuve1. »

Barnabas : Ayant été choisi pour vous succéder, je me suis engagé à amener nos étudiants universitaires à comprendre la dynamique de Dieu à l’œuvre parmi eux. Dieu dirige ceux qui s’accrochent à lui et il ne les laisse jamais tomber. Considérez l’exemple de William Borden, un étudiant de l’université de Yale en 19062. Au cours de son premier semestre dans cette université, il a mis sur pied une activité qui a fini par transformer la vie du campus. William et un ami ont décidé de prier ensemble tous les matins, avant le petit-déjeuner. Puis, un troisième et un quatrième étudiant se sont joints à eux. L’un de ses amis a écrit : « [William] nous lisait la Bible, nous montrait quelque chose que Dieu avait promis, puis se réclamait de cette promesse avec assurance3. » Vers la fin de sa première année, 150 étudiants de première année se rencontraient toutes les semaines pour étudier la Bible et prier. Et quand William a été en dernière année, 1 000 des 1 300 étudiants de Yale se réunissaient dans de tels groupes. Ils se focalisaient particulièrement sur les étudiants « perdus ». William Borden avait coutume de chercher les étudiants les plus sécularisés pour leur apporter la bonne nouvelle du salut. Il mettait leurs noms sur des listes de prières ciblées, ce qui aboutissait à la conversion de beaucoup d’entre eux.

 

DIALOGUE : Pourquoi est-il aussi utile d’apprendre à témoigner alors qu’on est étudiant à l’université ?

Barnabas : Les universités accueillent des jeunes gens brillants et talentueux aux aspirations et aux objectifs variés. À ce stade de la vie, il est plus important d’apprendre à devenir un chrétien accompli. Jésus a dit un jour qu’une personne qui réussit est une personne dont le fruit se multiplie (Jn 15.2-8) — c’est-à-dire que pour vivre une vie pleine de sens, il faut grandir à la fois intérieurement et extérieurement. L’essentiel est de faire de l’université — dans un esprit de prière — sa propre école missionnaire. En d’autres termes, il s’agit de faire de chaque jour et de chaque relation un laboratoire pour que le Saint-Esprit nous enseigne ce qu’il faut dire et comment agir. C’est cette même discipline qui permettra à un étudiant adventiste d’accéder aux domaines supérieurs de l’utilité pour Christ. L’université est l’endroit idéal pour apprendre à utiliser la méthode d’évangélisation du Christ et pour se mêler aux hommes avec tact et de façon gagnante4. L’université devient alors une échelle par laquelle les étudiants montent vers le service utile pour Christ, quelle que soit leur carrière.

Dale : C’est juste. L’expérience à l’université peut servir de catalyseur pour la croissance et la réussite personnelles. Pendant cette période, la tentation est souvent grande de laisser derrière soi la focalisation sur Christ et de considérer le développement universitaire quelque peu supérieur aux valeurs spirituelles et missionnaires. Il est vital pour les étudiants universitaires d’entretenir leur foi dans des petits groupes par la prière et l’étude biblique. Ces rencontres préparent les étudiants à profiter des occasions providentielles de partager leur foi dans le contexte de la communauté universitaire. Ce processus augmentera la confiance de l’étudiant qui, dans un esprit de prière, apprend comment surmonter les préjugés et avoir un impact positif sur la vie de ses collègues et de ses professeurs. Lorsque j’étais à l’université, il n’y avait aucune présence adventiste visible sur notre campus universitaire public de 25 000 étudiants. Trois d’entre nous ont prié et lancé un petit club sur le campus. Nous sommes rapidement passés d’une poignée de participants au culte hebdomadaire le vendredi soir à environ 25 étudiants. Puis, l’idée nous est venue de faire ensemble des activités de service sur le campus. Ça a été un moment puissant où ma foi a commencé à se mêler visiblement à mes études. Au cours de cette période, l’un de mes profs — un catholique non-pratiquant — me présentait dans certains contextes sociaux à d’autres personnes en disant : « Si vous avez des problèmes, n’hésitez pas à demander à Dale de prier pour vous. C’est un homme de prière. » Plus tard, lorsqu’il a reçu le diagnostic d’un grave problème de santé, il m’a demandé de prier avec ferveur pour sa guérison. La plupart des professeurs de mon département se sont enquis de mes valeurs spirituelles. Nous avons forgé des amitiés positives qui, à ce jour, se poursuivent.

 

DIALOGUE : Quel est le potentiel des étudiants universitaires pour la promotion de l’Évangile ?

Dale : Les étudiants universitaires occupent une position privilégiée pour faire avancer l’Évangile. Ils ont de l’énergie et sont ouverts à la prise de risque. Ils ont aussi de la créativité et sont informés par leur expérience au sein de leur propre génération et de ses valeurs uniques. C’est un élément important qui peut accélérer l’avancement de l’Évangile de nouvelles manières dans des endroits difficiles d’accès.

Par exemple, dans plusieurs pays du Moyen-Orient où l’activité chrétienne est limitée, des étudiants consacrés et créatifs partagent activement l’Évangile. Ils sont courageux, assurément. Mais ils ont aussi tendance à être plus flexibles sur le plan interculturel que les générations précédentes. Certains sont doués pour les langues et capables de transcender les préjugés culturels qui les entourent.

Barnabas : Je pense, par exemple, à Margaret (pseudonyme) de Madagascar. Il y a 10 ans, l’Église adventiste n’avait pas d’œuvre organisée dans la région qui s’étend du Maroc à la Lybie. Margaret a rallié les étudiants adventistes étrangers sur le grand campus où elle étudiait et a organisé un groupe se réunissant chez elle le sabbat. Elle a commencé à former les membres du groupe pour qu’ils puissent témoigner auprès de leurs camarades de classe. Elle a aussi organisé des projets de service à la communauté. Bien qu’elle est partie après l’obtention de son diplôme, on trouve aujourd’hui dans ces villes musulmanes environ 15 groupes du PCM très productifs sur une dizaine de campus environ, avec environ 300 étudiants du PCM grâce au travail de cette femme : elle a identifié un besoin et, dans un esprit de sacrifice, a dirigé par l’encadrement et le mentorat qu’elle a su apporter.

 

DIALOGUE : Quels devraient être les objectifs des étudiants adventistes qui poursuivent leur éducation dans des universités publiques ?

Dale : Le plus important est sans doute d’être un témoin vivant du Christ où que se trouve l’étudiant, sur le campus ou ailleurs. Tout en poursuivant leurs études universitaires, les autres étudiants devraient voir en eux une différence dans le mode de vie, la conduite, les relations et le sérieux avec lequel ils se préparent à la vie active. Après avoir terminé ses études universitaires, l’étudiant a plusieurs options. Il peut être comme Paul, lequel a utilisé sa profession de faiseur de tentes (Ac 18.1-4) comme un véhicule pour soutenir sa mission alors qu’il pénétrait dans des régions qui n’avaient pas encore été atteintes, et qu’il implantait des églises de maison partout où il exerçait son ministère. Bien entendu, d’autres utiliseront leurs talents professionnels pour servir l’organisation de l’Église en tant qu’employés. Et c’est très bien ! Mais nous constatons de plus en plus que le plus grand nombre d’occasions et de portes ouvertes dans les régions difficiles du monde sont pour ceux qui ne travaillent pas pour une organisation religieuse. Ceux qui ont une formation professionnelle générale et utile sur le marché trouveront qu’elle peut leur ouvrir des portes pour se donner une situation financière et, en même temps, pour ouvrir la voie à tout ministère personnel qui émerge dans ce contexte.

Barnabas : Nous voulons être influents et nous pensons à juste titre qu’une formation universitaire étendra notre influence. Ceci étant vrai, nous devons utiliser pleinement la responsabilité que nous confère une telle influence. L’influence au travail signifie généralement que les gens nous écoutent avec respect en raison de notre éducation ou de notre capacité professionnelle à contribuer. La gestion de cette responsabilité et de cette influence commence par une interrogation quotidienne : « Qu’est-ce que je dis ou fais qui aura une valeur éternelle pour cette personne ? » L’éducation universitaire permet à une personne de maximiser son influence pour Christ sur le marché.

 

DIALOGUE : En matière de philosophie et de mission, vos organisations étudiantes s’identifient elles-mêmes comme étant vaudoises. Quelles qualités du caractère incarne l’esprit vaudois ?

Barnabas : Qualifier notre organisation étudiante universitaire de « vaudoise », c’est incarner la double focalisation d’un disciple que Jésus a soulignée lorsqu’il a dit que ses disciples étaient dans le monde mais n’étaient pas du monde (Jn 17.16). Fondamentalement, les étudiants adventistes qui fréquentent une université publique doivent être capables de s’identifier avec le discipulat selon Jésus : « dans le monde, mais pas du monde ». Les étudiants adventistes fréquentant des universités publiques marchent sur les mêmes trottoirs, s’assoient sur les mêmes chaises et suivent les mêmes cours que leurs amis sécularisés. Mais ils doivent constamment réfléchir et même prier : « Parmi ceux qui m’entourent, qui a besoin de Christ ? Et comment puis-je être pour eux la bénédiction de Christ aujourd’hui ? » C’est le point de vue du royaume qui fait toute la différence. De nombreuses qualités de caractère rendent possible cette conscience du royaume. L’humilité, l’empathie et l’amour n’en sont que quelques-unes.

Dale : En outre, la capacité de prendre des initiatives personnelles dans tous les domaines de la vie est une autre qualité de caractère qui illustre l’esprit des Vaudois. Les témoins efficaces ne sont pas trop absorbés par la culture de leur Église d’origine. En d’autres termes, les témoins créatifs sont ceux qui sont capables de réduire leur dépendance aux ingrédients culturels de leur adventisme qui ne sont pas essentiels dans le partage de Christ dans le contexte local. Trop souvent, nous confondons et rebutons les gens dans notre environnement universitaire à cause de notre jargon ou de notre vocabulaire lié à l’Église, lesquels font partie de notre culture adventiste mais ne disent rien du tout à un non-croyant. Les étudiants qui témoignent efficacement apprendront à examiner attentivement et sagement le contexte dans lequel se trouvent leurs amis non chrétiens. Ils doivent apprendre à simplifier et à reformuler le message de l’Évangile de manière à le rendre plus attrayant pour leurs camarades de classe et leurs collègues.

Une attitude empreinte d’espérance est une autre qualité qui attire constamment nos semblables. Dans mon expérience universitaire et au-delà, on m’a toujours demandé : « Pourquoi sembles-tu avoir une espérance sincère dans ta vie ? » Souvent, les gens n’arrivent pas à comprendre que l’espoir véritable existe chez les autres.

Barnabas : C’est tellement vrai ! L’espérance a une force magnétique. L’étudiant que Jésus éclaire devient une énigme que les autres veulent résoudre. J’ai un ami aveugle en Turquie, anciennement musulman, qui m’a toujours dit : « L’espérance ne coûte rien ! Pourquoi ne pas la donner généreusement ? »

 

DIALOGUE : Quelles valeurs fondamentales des Vaudois aident aujourd’hui les étudiants à poursuivre les objectifs du PCM ?

Barnabas : D’une part, les efforts tenaces des Vaudois. Dans le langage d’aujourd’hui, on pourrait définir cette ténacité en ces termes : « Soif d’initier sans rien espérer en retour — auto-motivation ». Les premiers Vaudois étaient zélés pour Christ. Ils se souciaient plus du Christ que de leur carrière ou de leur diplôme. Ils consacraient tout leur être aux Écritures et au salut de leurs semblables. Leur zèle était inspiré du ciel.

 

DIALOGUE : Un étudiant universitaire devrait-il s’efforcer d’être une lumière sur le campus et de devenir un témoin efficace sur le marché ?

Dale : Absolument ! C’est la trajectoire sur laquelle le mandat évangélique place un chrétien consacré. L’expérience universitaire peut être un cadre de formation utile et une préparation pour devenir un témoin efficace sur le marché, au travail et dans son voisinage.

Source : Dialogue, « Un zèle vaudois dans le ministère sur les campus publics : une entrevue avec Dale Sherman et Barnabas Hope », Dialogue 32 (2020/1), p. 22-24

  1. Ellen G. White, La tragédie des siècles, p. 72.
  2. http://home.snu.edu/~hculbert/regret.htm.
  3. Mme Taylor Howard, Borden of Yale ‘09, Philadelphie, Mission intérieure de la Chine, 1926, p. 97.
  4. Ellen G. White, Le ministère évangélique, p. 364.
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