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DISCIPLINE ECCLÉSIASTIQUE – AIDER À LA RECONSTRUCTION DU MEMBRE PLUTÔT QUE DÉTRUIRE

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” Une approche pastorale des problèmes qui vise

à construire la victime du péché et non à la démolir.” 

L’Église de Corinthe est connue pour divers problèmes importants. L’un de ses membres vit avec la femme de son père, sans que la communauté ne s’en émeuve (1 Co 5.1,2). Il semble même que la prostitution (sacrée ou littérale) n’ait pas paru contraire à la foi de certains (6.15- 18). Les disputes au sein de la communauté sont patentes (6-7). Lors du service de communion, le riche mange et s’enivre devant le pauvre qui a faim (11.21). Les tensions sont importantes: chacun se réfère à un leader et trouve dans ce choix une raison de diviser l’Église (chapitres 1-3). Les dons spirituels sont prétextes à un sentiment de supériorité et de mépris (16.11).Finalement, leurs déviations doctrinales vont jusqu’à remettre en question la résurrection du Christ (ch. 15), la validité du mariage (ch. 7). Ces questions alimentent leurs conflits avec les divers responsables de l’Église et les conduisent même à remettre en cause l’autorité de Paul (2 Co 11.12-15).

Mais le plus étonnant, c’est que Paul considère la communauté comme « l’Église de Dieu qui est à Corinthe » (1 Co 1.2; 2 Co 2.2). Corinthe a l’honneur d’être la seule Église désignée par cette glorieuse formule. Plus encore, il appelle les membres de cette communauté « ceux qui sont saints par appel » (1.2 NBS).

Comment se peut-il que, disposant de multiples raisons pour exclure cette Église ou pour radier ses membres, Paul leur manifeste tant d’estime? Trouver la réponse à cette interrogation pourrait éclairer notre compréhension et nous fournir des conseils pratiques pour traiter des questions de discipline ecclésiastique.

Conformez votre vie à ce que vous êtes

Soulignons la première exhortation, la curieuse formule de 1 Co 5.7 « Faites disparaître le vieux levain… puisque vous êtes sans levain ». Quel paradoxe ! Comment peut-on ôter ce que l’on n’a pas ? Paul pose comme postulat que les Corinthiens sont sans levain, et leur demande, en conséquence, de supprimer tout levain. Loin de remettre en cause l’identité du malade qui provient de son inconduite, Paul l’appelle plutôt à modifier sa conduite pour la rendre conforme à son identité de chrétien. L’intention de Paul, reconnaissable dans son intervention, n’est pas l’exclusion des saints, mais bien plutôt leur correction.

Soyons constructifs

Paul présente, tout au long de cette épître, des façons d’agir à la fois bénéfiques et constructives. Il a, de toute évidence, repris à son compte la vocation de Jérémie et vu se réaliser, sous ses yeux les promesses faites à ce dernier (Jr 1.10; 31.28). Dieu plante et construit par le moyen de ses serviteurs (1 Co 3). Entrer dans le plan de Dieu, c’est construire : « Tout est permis, mais tout n’est pas utile; tout est permis, mais tout n’est pas constructif » (10.23). La construction est le trait du vrai prophète. « Celui qui parle en prophète, au contraire, parle aux humains : il construit, il encourage, il réconforte » (14.3). Lui seul édifie l’Église (14.4). Tout doit être fait en vue de cette édification (14.5).Les dons ont été accordés dans ce but (14.2). L’édification est le critère de toute action (14.26).Voir aussi Rm 14.19 et 15.2.

Rien d’étonnant à cela puisque le ciment de la construction est l’amour, car « la connaissance gonfle d’orgueil, mais l’amour construit » (8.1). Le thème central de la construction ouvre ainsi le chemin à une approche pastorale des problèmes qui vise à construire la victime du péché et non à la démolir.

Apportons notre soutien

Pour traiter du problème des dons et des conflits qu’ils génèrent au sein de l’Église, Paul a recours à l’amour agapê (ch. 13). Quand il donne une forme verbale aux trois vertus théologales que sont la foi, l’espérance et l’amour (13.13), Paul déclare en 1 Co 13.7 que l’amour croit tout (la foi), espère tout (l’espérance) et supporte tout (l’amour-agapê).Dans ce verset, le support hupomonê est donné comme synonyme de l’agapê —la NBS traduit : endurer, mais la forme verbale est à prendre dans un sens actif. Celui qui aime apporte à l’autre un soutien actif, sans faille. Aimer, c’est être capable d’accompagner l’autre alors même que sa condition est moralement difficile. L’amour suscite une approche corrective qui prend en considération les qualités du coupable et lui offre une occasion de reconstruire sa personne.

Soyons généreux

Selon 1 Co 9, Paul a cherché à se faire « tout à tous », « faible avec les faibles » (9.22). Il a suivi le modèle de son Maître, Jésus-Christ, et a compris que la rédemption passe par l’incarnation. Un proverbe indien dit qu’on ne peut connaître quelqu’un qu’en marchant dans ses mocassins.Alors que l’on demande souvent au pécheur de comprendre le choix disciplinaire décidé par l’Église, celle-ci doit être précédée par une recherche de compréhension du pécheur et des raisons de son échec.

Soyons vrais

Paul consacre les trois premiers chapitres de 1 Co aux disputes relatives aux prétentions des Corinthiens à posséder une plus grande connaissance. Chacun des groupes visés par Paul établissait sa notoriété en prétendant avoir un lien exclusif avec Paul, Céphas ou Apollos (1.12). Chacun voulait s’élever au plus haut pour faire valoir ses opinions.

Par Paul, à la lumière de la croix et de l’amour qui s’y manifeste, nous découvrons à quel point nous avons de la valeur aux yeux de Dieu, et nous n’avons aucune raison de nous vanter. Les orgueilleux ne peuvent le comprendre, « ce sont des choses que l’œil n’a point vues, que l’oreille n’a point entendues, et qui ne sont point montées au cœur de l’homme » tant elles sont étrangères à sa nature (1 Co 2.6- 11). Ainsi, nous ne pouvons être en mesure d’accompagner les autres dans leur processus de guérison, si nous n’avons pas une claire perception de nos limitations et de notre propre finitude. Pour être vrai, il faut approcher le coupable non dans une position de force, mais du plus profond de nos propres faiblesses.

Soyons cohérents

Au milieu de ces chapitres pastoraux se trouve un chapitre doctrinal (ch. 15) qui traite de la résurrection. Tel un bloc erratique au milieu d’une plaine, il semble n’avoir aucun rapport avec le reste de l’épître. Il semble cependant que Paul a pu être conduit à développer cette christologie spécifiquement en réponse aux problèmes de l’Église de Corinthe. Les péchés de Corinthe ne sont pas sans rapport avec leur abandon de la foi dans la résurrection.

La résurrection du Christ est un fait incontournable qui assure notre propre résurrection. Puisque nous, croyants, nous sommes appelés à ressusciter, tout doit être fait en fonction de ce paramètre.La résurrection n’est pas seulement une référence dogmatique, elle constitue aussi un fondement éthique. Cette dimension doit, non seulement présider à la conduite du croyant, mais elle doit aussi inspirer la cure pastorale. Tout soin pastoral doit intégrer la possibilité de la résurrection du coupable et maintenir des liens qui puissent subsister jusque dans l’éternité. Nos vies doivent être perçues du point de vue d’un appel particulier et de la grâce de vivre éternellement avec Jésus et avec nos frères et sœurs en Christ.

Conclusion

Le contexte montre clairement que Paul n’était pas contre toute intervention. Mais depuis sa rencontre ineffable sur le chemin de Damas, il demeurait fasciné par la personne de Jésus.Tout au long de sa vie, il s’est sans cesse souvenu de ses propres égarements et il a précieusement conservé la pensée de la grâce dont il a été l’objet. Il ne s’est jamais senti supérieur aux autres, et ne les a jamais jugés avec un sentiment de supériorité. Paul s’est, au contraire, perçu comme un pécheur qui a été racheté. Cette même perspective illumine son approche pastorale. Une perspective qui peut inspirer la façon dont nous approchons la discipline ecclésiastique.

Richard P. LEHMANN, DR en sciences religieuses, ancien recteur du Campus adventiste du Salève, à Collonges-sous-Salève, France.

Les citations bibliques sont extraites de La Nouvelle Bible Segond (NBS)

Article paru initialement dans la revue Ministry en français. Publié avec autorisation.

 

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